Soutien communautaire pour la jeunesse durant la COVID-19
Embûches, réussites et les prochaines étapes nécessaires
Par By Sarah Beydoun, Audrey Brunette, Charlotte Hoblyn, Cedric Joseph, Alexandra Wotchinski, Sydney Campbell, Franco A. Carnevale
L’attente déraisonnable d’une jeunesse résiliente face à la COVID-19 porte une ombre sur les façons particulières dont la pandémie a affecté et continue d’affecter les jeunes. Le milieu communautaire, dans lequel œuvrent cinq des auteurs de cet article, demeure témoin de ces difficultés et tente d’aider les jeunes à les confronter. LOVE (Québec) est un de ces organismes, qui continue à soutenir les jeunes pendant de la pandémie en tant que programme de développement social aidant les jeunes à s’épanouir dans diverses facettes de leur vie, dans sa branche québécoise comme à travers le Canada.
Si tous les jeunes ont subi des pertes pendant la pandémie, la manifestation de problèmes plus graves dépend de la situation dans laquelle vit le jeune. Pour certains, le plus grand défi a été de rester à l’intérieur toute la journée, tandis que d’autres, dans des situations plus précaires, ont adopté des comportements plus risqués pendant la pandémie. Les coordinateurs de LOVE ont également constaté que la pandémie avait eu des conséquences diverses sur les écoles. Dans de nombreux cas, ces défis ne sont pas nouveaux, mais la pandémie a exacerbé ces préoccupations tout en rendant plus difficile l’obtention de soutien adéquat. Pour certains, la pandémie a aussi suscité des traumatismes psychologiques les amenant à s’interroger sur leur avenir et à avoir des pensées suicidaires, ce qui souligne l’urgence des préoccupations. Dans ces cas, le soutien virtuel s’est montré particulièrement difficile et bouleversant pour les travailleurs communautaires.
Bien que LOVE ait trouvé des moyens de se ‘réinventer’ pour soutenir les jeunes avec des outils virtuels, la plupart d’entre eux n’ont pas interagi avec ces outils et la communication est devenue plus unidirectionnelle. Pour les coordinateurs du programme, diverses contraintes ont rendu difficile, sur le plan professionnel et émotionnel, de virtuellement soutenir et informer des jeunes qui souffrent pendant la pandémie, car ces travailleurs communautaires — dont les compétences relationnelles demeurent impressionnantes — n’ont pas l’expérience préalable ni l’expertise spécialisée pour adapter leur rôle essentiel à des espaces et des méthodes virtuels. Ces épreuves démontrent que non seulement les jeunes ne vont pas bien, mais le réseau de soutien dont ils ont besoin pour s’assurer que ‘ça va bien aller’ n’est plus accessible, car il s’en retrouve tout aussi ébranlé.
Malgré ces défis, LOVE a continué à servir les jeunes et demeure une partie importante de leur quotidien. Ses employés se sont ainsi tournés vers les réseaux sociaux pour répondre aux besoins des jeunes qu’ils servent. Le partage d’information en ligne a bien fonctionné et les jeunes ont continué à participer à des réunions non obligatoires lorsqu’elles étaient organisées virtuellement par les coordinateurs de LOVE. La pandémie a également permis à LOVE d’étendre sa portée grâce à son axe virtuel et de rejoindre plus de jeunes. Tout au long de la pandémie, les coordinateurs ont travaillé avec diligence pour demeurer une ressource accessible pour les jeunes et leur faire comprendre qu’ils seraient toujours là pour eux. Cependant, il reste encore beaucoup de changements à faire.
En nous appuyant sur nos expériences, nous recommandons et appelons donc à :
· La mise en œuvre de programmes de formation pour les travailleurs de soutien communautaire pour offrir leurs services dans de nouveaux espaces virtuels et pour modifier le soutien en présentiel lorsqu’il pourra reprendre.
· L’engagement de multiples parties prenantes (ex : les travailleurs du milieu communautaire, les jeunes, le cercle des décideurs) pour établir ensemble des stratégies visant à garantir le maintien d’un sentiment de normalité pour les jeunes desservis par des organismes communautaires, comme LOVE.
· Compte tenu leur travail incroyablement important et difficile, un soutien réfléchi aux travailleurs du milieu communautaire par leurs organismes et communautés (ex : débriefing de groupe, retraites adaptées, etc.)
· L’inclusion davantage de témoignages de jeunes et d’organismes communautaires dans les médias pour sensibiliser le public aux impacts de la COVID-19 sur ces groupes.
Alors que les jeunes soutenus par les organismes communautaires ont signalé les problèmes persistants auxquels ils font face et leur besoin de soutien adapté, les travailleurs communautaires vivent leurs propres défis en parallèle. Ces problèmes soulignent la nécessité de reconnaître que la gestion de la transmission du virus ne représente qu’une fraction, parmi tant d’autres, d’une réponse globale de la santé publique.
Sarah Beydoun, Audrey Brunette, Charlotte Hoblyn, Cedric Joseph, et Alexandra Wotchinski travaillent comme coordinateurs de programme avec LOVE Québec. Sydney Campbell, MA, est assistante de recherche avec l’équipe de VOICE à l’Université McGill et une candidate au doctorat à l’Université de Toronto. Franco Carnevale, inf., PhD (Psych), PhD (Phil), dirige le programme d’éthique de l’enfance de VOICE à l’Université McGill et collabore avec LOVE.
Ce texte a été traduit de l’anglais au français par Anna Gignac-Eddy, membre du Conseil Consultatif Jeunesse du programme de recherche Voix de l’enfant (VOICE): Études interdisciplinaires en éthique de l’enfance de l’Université McGill et étudiante à la faculté de droit de l’Université McGill.